Prise
dans toutes les tourmentes, l’économie africaine ne prend pas de mieux.
Même si la croissance se décline à deux chiffres dans certains pays, le
lourd poids de la dette vient assombrir chaque année les horizons
budgétaires.
Pour quelques spécialistes, l’une des solutions reviendrait à échapper
à cette spirale qui fait qu’on annule pour réemprunter ou alors on
s’endette pour payer le service… d’une dette dont on n’a toujours pas
retourné le capital. Une option dite du « désendettement-réendettement
».
Pour d’autres, un peu plus radicaux, on devrait imposer de rééquilibrer
la répartition des richesses dans le monde. Cela d’autant plus que la
question de la dette part de repères idéologiques pour s’achever dans
les choix de politique publique.
Au niveau des chiffres, la dette publique africaine - estimée
aujourd’hui à 300 milliards $ - concerne essentiellement les pays de
l’Afrique sub-saharienne, le Maghreb étant lié au Moyen-Orient dans les
indicateurs disponibles. Cette dette publique est composée de plusieurs
titres qui vont des prêts multilatéraux dus aux Institutions aux
emprunts privés en passant par les dettes bilatérales dues à des États
tiers.
Malgré le Cadre de viabilité mis au point par les bailleurs de fonds
pour mieux coordonner les financements, les pays africains devront
prendre certaines résolutions. Ces dernières sont d’abord un
ralentissement du recours systématique aux emprunts, une discipline
budgétaire stricte qui tient compte de la fluctuation des taux de
change et la mise sur pied d’initiatives permettant des rentrées
financières plus importantes. Enfin, l’imprudence en matière de gestion
économique est l’un des facteurs responsables de l’échec du
développement de tissus industriels et de filières commerciales
rentables.
En dehors de ces propositions relevant de la logique comptable,
plusieurs appellent de leurs vœux à une annulation totale de la dette
africaine. Les raisons avancées vont de l’argument historique,
réparation pour le pillage des ressources, à l’argument économique qui
explique que le remboursement de la dette se fait dans des mesures
disproportionnées et inéquitables, en passant par l’argument juridique
qui invoque la nature de plusieurs régimes ayant contracté des dettes
appelées « odieuses ».
À ces éléments s’ajoute l’argument politique qui veut que l’ensemble
des décisions économiques du Sud en général, et des pays africains en
particulier, est décidé dans les grandes capitales occidentales et au
sein d’institutions dans lesquelles ces nations n’ont pas de pouvoir de
décision. Cela demande donc un changement radical de politique et
d’attitude. Est-ce réaliste et possible ?
Plusieurs économistes sont affirmatifs à ce sujet. D’abord parce que la
conjoncture de l’après-crise est favorable à plusieurs niveaux. Au
titre du remboursement parce que les taux d’intérêt sont très bas dans
les banques centrales des pays occidentaux, au niveau des matières
premières dont la hausse des prix permet d’engranger des devises fortes
et enfin sur la circulation des capitaux, de nombreux placements se
font du Nord vers le Sud sous forme d’investissements directs. Malgré
sa fragilité apparente, elle augure de meilleures perspectives pour la
santé économique des pays africains.
Politiquement parlant, les mouvements sociaux et une plus grande
ouverture politique ont imposé une meilleure gouvernance. Cela impose
une rupture avec une certaine orthodoxie en mettant sous contrôle
citoyen un ensemble de leviers financiers et économiques et permettrait
d’être un peu moins à la merci des institutions internationales et
leurs solutions pas toujours indiquées. L’exemple des pays d’Amérique
latine est là pour le démontrer et des gouvernements comme celui de
l’Équateur sont allés jusqu’à inscrire dans leur Constitution des
règles précises à propos de l’endettement public. Deux articles y
déterminent et limitent strictement les conditions dans lesquelles les
autorités peuvent contracter des emprunts et rejettent la possibilité
d’emprunter pour payer d’anciennes dettes.
Autant de pistes à explorer qui rejoindront les voies déjà gagnantes
des intégrations régionales et du renforcement des économies nationales.
Source: Afrique Expansion Magazine